1 Février 2020
Le 23 juillet 2011, à 27 ans, Amy Jade Winehouse est retrouvée morte dans le lit de sa maison de Camden à Londres, trois bouteilles de vodka vides (deux grandes et une petite) à ses pieds.
Drôle, intelligente, grande gueule, la chanteuse de jazz est devenue ultra-populaire grâce à son deuxième album Back to Black, produit par Mark Ronson.
Des milliers de jeunes filles imitent son style de pin up sixties, ses hauts cheveux retenus par un noeud et sa manière de souligner on regard d'un épais trait d'eye liner noir. Pourtant elle est dépressive et fragile. Ses parents ont divorcé quand elle avait 9 ans. Son père quitte le foyer, un drame dont elle ne se remettra jamais, recherchant son amour dans le regard de tous les hommes qu'elle croise. Boulimique depuis ses 15 ans, elle est accro aux drogues, à l'alcool, et aux amours dysfonctionnels. D'ailleurs, elle a écrit ses plus grands tubes après avoir été larguée par son petit ami Blake Fielder-Civil, un loser du quartier dont elle est folle.
Quand celui-ci la plaque en 2005, elle arrête de se nourrir et boit du matin au soir. Ses amis essaient de l'emmener en cure de faire soigner. Amy leur répond qu'elle n'ira que si son père trouve que c'est une bonne idée.
Mais voilà, pour Mitch Winehouse, papa poule depuis que sa fille a du succès, «elle n'a pas besoin d'y aller». Fin de la discussion. Amy puise dans les bouteilles de de gin et sa douleur pour écrire Back To Black.
Nick Shymansky, son ami et manager, est désespéré : «Je crois que nous avons manqué une opportunité clé. Je ne dis pas que ça aurait marché tout de suite, mais à ce moment-là, elle n'était pas une star, elle n'était pas harcelée par les paparazzi, elle aurait eu une chance d'être suivie par des professionnels avant que le monde entier ne veuille un bout d'elle». (Amy, documentaire de Asif Kapadia, 2015)
Sorti en 2006, Back to Black est un des albums les plus vendus du siècle en Angleterre. Il lui permet aussi de décrocher cinq Grammy Awards, un record pour une artiste féminine. Pourtant, Nick Shymansky refuse de continuer à la manager tant qu'elle ne prendra pas un meilleur soin de sa santé.
La chanteuse demande alors à Raye Cosbert, son promoteur, de devenir aussi son manager, au grand dam de Nick Gatfield, à l'époque président de son label Island Records. «Mais pourquoi tu veux ça ? lui demande-t-il. Tu vas être managée par quelqu'un dont le principal intérêt est de te faire jouer un maximum dans le monde !» Il sait bien qu'Amy est vulnérable quand elle est sur la route.....Olia Ougrik, présentatrice pour MCM à l'époque, se souvient l'avoir croisée à un festival : «Elle a annulé notre interview, lui préférant le bar...Quand elle a demandé un whisky et qu'on lui a servi un verre d'eau, elle a pété les plombs ! Elle touchait tout le temps ses cheveux, elle avait l'air hyper mal à l'aise. C'était vraiment triste». (À l'auteur, le 24 mars 2017).
Avec le succès de Back to Black, Amy accède au rang de superstar. Elle est constamment filmée, photographiée, enregistrée. Devenue richissime, son chômeur d'ex-petit ami Blake décide comme par hasard de revenir dans sa vie. Ils se marient en mai 2007 à Miami.
Dans la corbeille de mariage, Blake ne déposera qu'un cadeau : du crack-cocaïne, une drogue hautement addictive. Aveuglée par les flashs des paparazzis, Amy ne voit pas que sa vie est en train de dérailler. Pendant ses concerts, elle chante faux, se frappe le visage, ses yeux verts écarquillés : elle est défoncée.
À sa première overdose, son père lui fait passer quelques jours dans un hôtel de luxe puis la renvoie impitoyablement en tournée. Lauren, sa meilleure amie d'enfance, est dépitée : «Nous avons supplié Mitch de l'empêcher de partir en tournée, de prendre son passeport, de faire quelque chose. Elle avait besoin d'aide. Il a répondu : «Je ne peux pas faire ça, sa tournée est bookée ! » (Amy, documentaire de Asif Kapadia, 2015)
Elle a 23 ans et les médecins sont clairs : à la prochaine over-dose, elle y passera.
Blake s'introduit pourtant dans sa chambre d'hôtel pour lui apporter de l'héroïne. Et lorsqu'elle consulte Chip Somers, un conseiller en toxicomanie, Blake tient à l'accompagner : « Elle était très vulnérable et j'ai très clairement senti qu'il était dans une position qui était favorable à son addiction et qu'il ne voulait pas qu'elle s'en sorte de peur de laisser s'échapper ce bon filon», commente-t-il. Le conseiller refuse alors de les recevoir ensemble en cure de désintoxication : «Ce n'était pas une éthique». Néanmoins, le père d'Amy et son promoteur trouvent une clinique qui accepte de traiter en même temps les deux drogués !.
Dans le centre, Blake continue d'abreuver sa femme en drogues. Par chance pour la santé d'Amy, en juillet 2008, son mari est envoyé en prison pour avoir agressé le patron d'un bar et tenté de le corrompre. Son label en profite pour envoyer de force la chanteuse en cure de désintoxication afin qu'elle soit clean à la cérémonie des Grammy.
En février 2009, Amy Winehouse essaie de trouver un peu de paix et de repos sur l'île de Sainte-Lucie quand son père débarque avec une équipe de film. Il est en effet devenu le personnage principal d'une émission de téléréalité : «My Daughter Amy». Shomari Dilon, ingénieur du son, est écoeuré : «Elle voulait juste son père mais il n'est pas venu seul, il est venu avec des caméras et des preneurs de sons.....» Salaam Remi, son producteur, confirme : «Elle disait : Mais pourquoi est-ce qu'il amène des caméramen à Sainte-Lucie ? Tu veux de l'argent, je t'en donne. Pourquoi est-ce que tu fais l'histoire de ta vie qui est en réalité la mienne ?» Quand l'émission est diffusée en janvier 2010 sur Channel 4, Amy tweete : «POURQUOI MON PÈRE N'ÉCRIT PAS UNE CHANSON quand quelque chose le tracasse plutôt que d'en parler sur une chaîne de télévision nationale ? ».
Le marché du disque décline, mais Amy doit continuer à remplir les stades. Elle n'en peut plus de chanter Back to Black, alors elle boit jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus tenir debout, sabotant ainsi ses propres concerts, dont les cachets exorbitants enrichissent son entourage.
Seul son père aurait assez d'autorité sur elle pour pouvoir l'extraire de cette bulle infernale. Mais il aime trop cette lumière qui se réverbère vers lui, qui lui a même permis de sortir un album de jazz. Ne pourrait-elle pas continuer encore un peu ? Non, les médecins sont catégoriques : après des années d'abus de substances et de boulimie, Amy mourra si elle continue ainsi.
Y pense-t-elle en avalant ces trois fatales bouteilles de vodka le 22 juillet 2011 ? Elle a 416 mg d'alcool dans le sang quand son coeur s'arrête (The Gardian, le 26 octobre 2011).
Jamais à court d'idées pour exploiter la notoriété se sa fille, même après sa mort, son père s'apprête à raconter la vie d'Amy en comédie musicale !!!
Dans Rehab, Amy Winehouse chantait :
♪♫ They tried to make me go to rehab / Ils essaient de m'envoyer en cure de désintoxication.
I said, no, no, no / J'ai dit non, non, non
Yes, I been black, But when I come back, you'll know, know / Oui, j'ai sombré, mais quand je reviens, vous saurez, saurez...
I ain't got the time / que je n'ai pas le temps
And if my daddy thinks I'm fine ♪♫ / Et si mon papa pense que je vais bien.......