20 Janvier 2018
Le scandale, révélé fin 2016, a ébranlé la discipline et entraîné la démission en mars 2017 du président de la Fédération, USA Gymnastics, Steve Penny. Il était accusé d’avoir alerté les autorités trop tardivement au sujet d'accusations d'abus sexuels. La fédération a affirmé avoir, depuis, adopté une nouvelle «politique sportive sûre» qui requiert de «rapporter obligatoirement» tout soupçon d’abus sexuel.
Larry Nassar, médecin emblématique de la sélection américaine de gymnastique a été condamné en décembre 2017 à 60 ans de prison pour détention de matériel pédopornographique, un des volets du scandale d’abus sexuels sur des jeunes athlètes qui a fait vaciller la Fédération.
Il a été condamné à 20 ans de réclusion, la peine maximale, sur chacun des trois chefs d’inculpation pour lesquels il avait plaidé coupable devant le tribunal fédéral de Grand Rapids, dans le nord des États-Unis.
Plus de 37.000 images et vidéos pédopornographiques avaient été retrouvées dans les disques durs de ses ordinateurs, selon les enquêteurs.
«Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il a des remords», a réagi devant la presse l’une de ses avocates à la sortie du tribunal, refusant de commenter la sentence.
Larry Nassar doit encore connaître les décisions attendues en janvier de deux autres cours de l’État du Michigan dans le volet principal de l’affaire qui concerne des accusations d’agressions sexuelles sur au moins 125 athlètes, dont des membres de l’équipe féminine olympique médaillée aux Jeux de Londres (2012). Il a plaidé coupable pour dix chefs d’inculpation et risque la prison à perpétuité.
Ses victimes avaient moins de 15 ans lors des agressions qui se sont déroulées de 1998 à 2015. Le médecin se livrait à des attouchements sur les jeunes filles en prétextant des massages pour soigner des blessures au dos ou aux hanches.
Aly Raisman, McKayla Maroney et Gabby Douglas, toutes trois médaillées d’or olympique, figurent sur la longue liste des victimes du Dr. Nassar. Elles avaient décidé de s’exprimer publiquement après la cascade mondiale de révélations d’abus sexuels déclenchée par l’affaire Weinstein.
«Je ne suis pas une victime, je suis une survivante», a écrit Aly Raisman dans un texte réclamant des changements «dans les systèmes qui ont encouragé les agresseurs sexuels». Elle s’en est prise à la Fédération américaine, au comité national olympique et à l’Université du Michigan où il était médecin. «Ceux qui ont détourné le regard doivent aussi rendre des comptes», a affirmé la gymnaste aux 6 médaillés olympiques dont 3 d’or aux Jeux de Londres (2012) et Rio (2016).
John Manly, l’un des avocats des victimes, a lui aussi dénoncé «un système qui a abandonné ses jeunes femmes pendant 20 ans», lors d’une conférence de presse. Une autre accusatrice, Rachael Denhollander, l’a ensuite qualifié de «plus grand pédophile américain de ces 210 dernières années».
Selon les gymnastes, ses agissements étaient confortés par l’environnement particulier de la gymnastique de haut niveau, où les plaintes et les signes de blessure pouvaient mettre en danger les rêves olympiques.
Larry Nassar, marié et père de trois filles, était considéré comme l’un des meilleurs thérapeutes sportifs et cultivait des relations étroites avec les gymnastes, faisant preuve de moins de sévérité que ses collègues : «Nous protégeons nos athlètes (…) pas seulement physiquement mais mentalement », disait-il en 2013. «Vous devez leur faire savoir que vous vous souciez d’eux (…) Qu’ils le sentent.»
L’ostéopathe avait intégré l’encadrement médical d’USA Gymnastics en 1986, avant d’être nommé coordinateur médical national dix ans plus tard, jusqu’en 2015.
En 1997, il avait en parallèle rejoint la clinique sportive de l’Université du Michigan (MSU). Les premières accusations d’attouchements datent de cette époque mais les plaintes déposées ont été classées sans suite par la MSU. L’université, qui s’est séparée du médecin après les révélations de la presse, est accusée d’avoir tardé à dénoncer les agissements de Larry Nassar. La MSU a assuré après une enquête interne ne pas avoir trouvé de preuve de manquements dans le traitement de ces plaintes.
Les championnes olympiques Jamie Dantzscher et McKayla Maroney ont confié jeudi dernier au tribunal leurs éprouvants témoignages contre Larry Nassar, l'ancien médecin de l'équipe de gymnastique des Etats-Unis accusé d'agressions sexuelles sur plus de cent anciennes athlètes.
«J'ai cru mourir cette nuit-là», a déclaré McKayla Maroney dans un témoignage écrit, lu au tribunal par le procureur. La sportive évoquait un voyage à Tokyo quand elle avait 15 ans. Elle accuse Larry Nassar de lui avoir à l'époque donné un somnifère. Quand elle s'est réveillée, le médecin était en train d'abuser d'elle.
«Ce n'était pas un médecin. C'était un pédophile. Il m'a laissé des cicatrices mentales qui ne partiront jamais», a ajouté la jeune femme aujourd'hui âgée de 22 ans, qui affirme que le médecin l'a agressée pendant des années.
La Fédération américaine de gymnastique (USA Gymnastics) n'était revenue que la veille sur sa décision, qui avait fait scandale, d'empêcher la jeune femme de s'exprimer publiquement sur ces abus sexuels. Elle invoquait l'accord d'indemnisation d'1,25 million de dollars signé avec la famille Maroney en décembre 2016, dans lequel l'ancienne gymnaste s'était engagée à ne pas s'exprimer sur l'affaire, sous peine de devoir payer une amende de 100.000 dollars.
Parmi les premières à avoir accusé publiquement le médecin, Jamie Dantzscher, elle, s'est adressée directement au médecin dans la salle d'audience.
«Tu m'as manipulée pour que je croie que tu étais gentil et que tu m'aidais pendant que tu m'agressais sexuellement, encore et encore et encore, pour ton seul plaisir sexuel tordu», a lancé la femme de 35 ans.
L'émouvante litanie des victimes, souvent en larmes, résonne dans ce tribunal de Lansing, dans le Michigan (nord), depuis mardi.
Assurant craindre pour sa santé mentale s'il était forcé d'écouter tous leurs témoignages, le médecin a demandé à la juge Rosemarie Aquilina d'être excusé. Cette dernière lui a répondu publiquement durant l'audience, d'un ton indigné : «Passer quatre ou cinq jours à les écouter n'est rien du tout par rapport aux heures de plaisir que vous avez pris à leurs dépens, en détruisant leur vie».
Parmi ses victimes figurent certains des plus grands noms de la gymnastique américaine contemporaine, dont les médaillées d'or par équipe Simone Biles, Aly Raisman, Gabby Douglas et McKayla Maroney.
Pendant que les témoignages s'enchaînaient au tribunal jeudi, le journal local The Detroit News a affirmé qu'au moins 14 responsables de l'université d'Etat du Michigan, qui employait Larry Nassar, avaient eu vent d'accusations d'agressions sexuelles dès 1997.
L'université a licencié M. Nassar en septembre 2016, quand des accusations ont été rendues publiques. «Toute suggestion que l'université ait pu couvrir la conduite atroce de Nassar est tout simplement fausse», a réagi son porte-parole Jason Cody, dans un communiqué.
Jeudi également, USA Gymnastics a décidé de mettre fin à son partenariat avec le célèbre centre d'entraînement national, connu sous le nom de ranch Karolyi, où Larry Nassar a commis des agressions sexuelles.
La gymnaste Arianna Guerrero, âgée de 16 ans, s'est écriée :
«Vous Larry, vous avez transformé un sport que j'aimais en un sport que je déteste...Et je te déteste tellement. Je n'ai que 16 ans. Je ne devrais même pas savoir à quoi ressemble une déclaration d'accusation d'agression sexuelle. Je ne devrais pas savoir à quoi ressemble l'intérieur d'une salle d'audience. Tu as du mal à me regarder maintenant, mais pas quand j'étais sur ta table, à moitié nue».
Plusieurs victimes ont choisi de rester anonymes, dont deux qui ont déclaré ne pas avoir compris qu'elles avaient été maltraitées jusqu'à ce qu'elles lisent le reportage initial de l'Indianapolis Star sur Nassar. L'une d'entre elles, qui a actuellement 19 ans, a déclaré que Nassar l'avait maltraitée lorsqu'elle était adolescente dans son sous-sol, alors que sa femme et ses enfants étaient à l'étage.
Bien qu'une condamnation devait initialement être prononcée hier vendredi, la juge Rosemarie Aquilina a laissé entendre qu'elle serait plus susceptible d'être repoussée en début de semaine prochaine, de nombreuses victimes étant toujours disponibles pour prendre la parole.
► Á chaque fois que ces choses arrivent, la société cherche simplement à nommer les bons ou les méchants, puis passe à autre chose, sans jamais penser vraiment aux personnes impliquées qui ont permis que cela se produise. Il y avait des dizaines de personnes qui auraient pu mettre un terme à cela et qui ne l'ont pas fait.
Les journalistes, les juristes, ne prennent pas le temps non plus à expliquer comment reconnaître quelqu'un comme Nassar ou à quel point ces gens sont manipulateurs envers non seulement les enfants, mais aussi les adultes.
Personne ne passe jamais de temps à expliquer la façon de reconnaître les symptômes d'un enfant victime de violences sexuelles ou la façon de réagir quand les enfants disent qu'ils ont été maltraités. Alors les gens préfèrent fermer les yeux, en continuant de croire qu'après tout ce n'était pas si grave et que les victimes s'en remettront. Où alors elles les accusent en prétendant qu'elles voulaient de l'argent ! ou encore qu'il s'agissait de diffamation, que c'était inventé de toutes pièces dans le but de nuire !
Défendre l’indéfendable donne mal au coeur !
En réfléchissant à la façon de prévenir de telles situations, je pense qu'il est important de comprendre que des milliers de gens sont capables de faire ce que Nassar a fait !
Mise à jour :
L'ex-médecin sportif Larry Nassar, accusé de multiples abus sexuels des jeunes gymnastes, passera le reste de sa vie en prison. Il a été condamné à l'issue d'un procès historique où les victimes ont livré des témoignages poignants de leur vie brisée. «Je viens de signer votre arrêt de mort», a même lancé, mercredi 24 janvier 2018, la juge Rosemarie Aquilina en prononçant une peine allant de 40 à 175 années de prison pour sept chefs d'inculpation.
Cette sentence s'ajoute à une condamnation à 60 ans de réclusion pour pédopornographie, un autre volet de l'affaire qui a secoué le monde de la gymnastique américaine.
L'affaire a fait tomber plusieurs têtes au sein de la Fédération américaine de gymnastique accusée d'avoir tardé à dénoncer ces agissements. Le comité national olympique (Usoc), où Nassar a officié pendant quatre JO, va lancer une enquête indépendante pour «déterminer comment des abus d'une telle ampleur n'ont pas été détectés pendant aussi longtemps».
La Juge Rosemarie Aquilina et toutes les femmes dans ce procès, sont les icônes morales et humaines de l'année 2018.